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8 - U=U

Dernière mise à jour : 3 mai 2021


Illustration @mehdi_ange_r (INSTAGRAM)

Je l’ai déjà abordé furtivement dans mon récit où je parle du traitement, mais je souhaite vraiment développer ici la notion d’indétectabilité et surtout vous raconter l’impact que cela a pu avoir psychologiquement sur moi, notamment lorsque j’ai pu être en couple.

Quand j’ai appris que j’étais atteint du virus, mon rapport au corps avait complètement changé. J’avais peur de tout, du moindre rhume, des moindres bactéries. Même le simple fait de devoir prendre le métro me paralysait, vue la quantité de microbes qui y circulaient. J’étais devenu phobique de tout, je voulais me préserver. Moi aussi finalement j’avais mes propres croyances vis-à-vis du VIH, qui ont bien évolué depuis évidemment, mais à l’époque je ne connaissais pas encore ma maladie et je devais apprendre à vivre avec.

J’ai commencé le traitement dès que j’ai appris ma contamination. Ma charge virale a tout de suite été indétectable et cela n’a jamais bougé depuis. Mes défenses immunitaires, elles, sont très fainéantes mais elles remontent petit à petit. J’ai vraiment appris à écouter mon corps depuis dix ans. Je ne me force plus : si je n’ai pas l’énergie de faire quelque chose, je ne le fais pas. Ce n’est pas du tout mal perçu par mon entourage.

Au tout début, lorsque j’ai appris que le VIH faisait partie de ma vie, j’étais avec D. Je me souviendrai toujours de la première fois où nous avons fait l’amour après avoir appris la nouvelle. Je n’avais pas encore saisi que moi aussi j’y avais le droit.

D était en école de médecine, il m’a donc rassuré sur tout le plan sexuel dès le début. Je me disais que si lui s’autorisait à faire ceci ou cela avec le savoir qu’il avait sur le sujet, c’est qu’on ne prenait pas de risques et que je me devais de cesser d’avoir peur de transmettre le virus.

Je crois que ça fait partie du chemin d’un séropo : comprendre qu’il ne va pas transmettre le virus, à partir du moment où il prend son traitement.

Je me trouve très chanceux d’avoir rencontré D à ce moment-là de ma vie. Je pense qu’il ne le sait pas mais je lui suis très reconnaissant car il m’a véritablement aidé à garder la tête hors de l’eau et à retrouver confiance en moi. Pendant toute notre relation nous avons utilisé le préservatif. Nous n’avons eu aucun souci avec cela. Nous n’allons pas nous mentir, c’est forcément différent avec, mais à l’époque moi ça me rassurait énormément et il n’y avait pas d’autres options envisageables dans mon esprit.

Nous nous sommes séparés après deux années de relation, et après un long break, en 2012, j’ai rencontré N.

Pour l’anecdote, lorsque j’ai parlé du VIH avec lui je n’ai plus eu de nouvelles pendant six mois, jusqu’à ce qu’il m’envoie un texto pour reprendre contact : « Salut c’est N »… Je me suis fait un plaisir de répondre « N qui ? ». C’était ma petite vengeance personnelle.

Nous sommes restés ensemble quatre années, donc peut-être que ces six mois de réflexion valaient le coup après tout, même si sur le moment cela m’avait beaucoup affecté.

Est venu ce moment où je suis allé à l’hôpital pour mon rendez-vous semestriel. Et là mon médecin constate une fois de plus que la charge virale est toujours indétectable. Cela faisait quatre ans que c’était le cas, et elle me parle de : U=U (indétectable=intransmissible). Elle m’explique, pour la première vraie fois depuis ma contamination, que puisque je prends mon traitement comme il faut, que tout va bien, je ne transmets plus le virus. Je la regarde et je lui dis : « Mais ça veut dire même sans préservatif ? ».

Elle ne m’a jamais encouragé à ne pas en mettre, elle m’a juste fait comprendre que si j’avais un partenaire fixe je ne risquais rien (en étant sûr de sa fidélité, parce que oui, autre chose, la capote sert aussi à se protéger des autres MST et IST). C’est une décision de couple bien évidemment, mais c’est possible. J’avoue que cette information a été assez libératrice et un vrai soulagement.

Avec N nous avons donc pris la décision ensemble de ne plus en mettre au bout d’un certain temps, car malheureusement le port du préservatif était plutôt compliqué pour nous. Je pense que certain•e•s ne comprendront pas, mais j’avais confiance en N et réciproquement. À partir de là nous n’avions rien à craindre l’un de l’autre.

La condition était que N fasse un test tous les six mois pour contrôler que tout allait bien.

À partir du moment où il avait décidé, après ce long moment de réflexion, de revenir vers moi et de s’engager dans une relation, le VIH n’a jamais été un souci pour N. Je suis très fier de nous pour ça, de la confiance que nous avions l’un envers l’autre.

J’ai eu deux grandes histoires d’amour depuis que je suis séropo et s’il y a bien quelque chose de positif que je peux en tirer c’est qu’avec ces deux garçons-là, on s’est aimé de façon inconditionnelle, et même si le VIH peut rendre une relation plus compliquée, une fois que l’on trouve le bon, elle est aussi plus intense et plus vraie. Une personne qui ne fuit pas devant votre séropositivité vous choisit pour tout votre être et non pas pour une représentation qu'elle se fait de vous et de l’amour.

Moi je me trouve chanceux.

PS : Je ne fais aucune propagande autre que celle d’aimer. Ce choix de ne plus mettre de préservatif avec N, nous l’avons fait à deux. Pour tous autres types de relations qui ne seraient pas basées sur une confiance mutuelle, évidemment la protection s’avère inévitable, et si vous avez des questions parlez-en à votre médecin. Néanmoins il est important d'être informé•e sur ce "U=U", car c'est un facteur très important sur la qualité de vie des personnes séropositives et sur l'éventuelle culpabilité que nous pouvons ressentir à l'idée de transmettre le virus qui, une fois que l'on est indétectable, n'est plus possible.

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