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19 - LE CHEMIN

Dernière mise à jour : 25 janv. 2021


Je suis enfin en vacances.

Ne serait-ce pas le meilleur moment pour faire un bilan de cette première année bordelaise?

Comme vous le savez j’ai quitté Paris en juin 2018, après 15 années, pour venir m’installer dans le sud ouest. Ceci était un projet de longue date que j’avais avec N. et que j’ai osé tenter finalement en solo. J’ai beaucoup de chance car j’ai eu le soutien de mes employeurs ce qui m’a énormément rassuré. Je ne serais jamais parti si je n’avais pas pu conserver mon job. Je fais partie de ces gens qui aiment ce qu’ils font et en même temps je me suis beaucoup battu pour. De ce fait avoir leur soutien n’était pas du luxe.

Mon arrivée a été un peu compliquée. Je ne connaissais que deux personnes. Certes il s’agit de P. et de son amoureux A., mais je suis habitué à avoir beaucoup de gens autour de moi. Les deux premières semaines ont été un peu difficiles. Je me suis réellement demandé si j’avais fait le bon choix.

Et puis j’ai rencontré J. merveilleuse et pétillante, qui m’a un peu pris sous son aile et m’a introduit à son groupe d’amis. Quand j’ai rencontré toutes ces personnes, je me suis tout de suite senti moi. J’avais le sentiment à Paris de ne pas pouvoir l’être, de devoir jouer un rôle, et que finalement être moi ne pouvait pas s’envisager simplement. Mais là non, rien de tout cela. Tout le monde est différent, tout le monde évolue dans des univers bien distincts, mais ce qui lie finalement ce petit groupe c’est la sincérité des moments partagés, la disponibilité, une certaine vision du monde aussi et surtout : personne ne juge personne.

Tout ceci pour dire que ma solitude amicale fut de très courte durée et c’était bien cela qui m’inquiétait pourtant. En y réfléchissant c’est aussi ce que je recherchais en partant de Paris: avoir plus de temps pour prendre le temps justement, pour observer, digérer, vivre mais à un rythme plus doux.

Je ne savais pas encore pourquoi j’avais besoin de cela mais toujours est-il que c’est seulement quelques mois après que j’ai lancé le blog. Parce que j’en avais l’énergie, le temps et que forcément quand on a moins de parasites au quotidien pour faire diversion, certaines blessures s’autorisent à refaire surface. J’aurais trouvé dommage de ne pas les guérir.

Je n’ai pas attendu d’être à Bordeaux pour subir le rejet vis-à-vis du VIH, mais l’impression qu’ici les choses ont été plus intenses. Bon j’avoue je ne me suis pas privé de rencontrer des garçons les premiers mois. Je ne réussissais pas forcément à parler de cela avec eux, alors parfois quand bien même un garçon me plaisait, je préférais ne plus donner de nouvelles pour ne pas avoir à affronter une déception potentielle.

Je suis arrivé à l’apogée de ce que le silence pouvait m’apporter de négatif avec le garçon Nantais, qui avait provoqué ce fameux déclic libérateur et honnêtement, libérer ma parole m’a sauvé la vie.

Je pèse mes mots en l’écrivant.

J. et P. m’ont dit il y a peu, sans se concerter :

« Quel chemin tu as fait en quelques mois. »

Je n’ai plus l’impression de subir ma vie, de subir les autres et leur rejet. Aujourd’hui je suis complètement heureux.

J’ai évidemment eu des moments un peu difficiles cette année, dont certains que j’ai préféré taire sur le blog. Mais le fait de me connaître, d’être en phase avec moi, d’être entouré par les bonnes personnes a considérablement accéléré la cicatrisation de ces nouvelles blessures.

Vis-à-vis du célibat je sens que quelque chose a changé également. Je le vis, le perçois autrement. J'ai dernièrement réalisé à quel point je pouvais me modifier, m’adapter, pour convenir à une personne et c’est une chose que je refuse de reproduire aujourd'hui. Tout ça par peur du rejet, de ne pas être aimé. Je n’en ai plus rien à faire de ne pas être aimé. J’ai décidé de m’aimer un peu plus moi-même pour créer cette balance et cela fonctionne bien. Si un mec vient s’intégrer dans ce contexte alors j’en serai ravi, mais en attendant je ne me battrai plus dans le vide.

D’un point de vue médical, mes deux dernières analyses sont très bonnes. Depuis que j’ai quitté Paris mes CD4, d'habitude très fainéantes, sont remontées en flèche. Comme quoi le cadre de vie, l’état psychique peuvent aussi avoir leur importance au-delà du traitement.

J’ai dit au revoir au Professeur qui me suivait à Paris depuis 11 ans. J’ai longtemps hésité mais je trouve plus pratique de me faire désormais suivre à Bordeaux. Elle m’a dit adieu comme si j’étais patient un parmi d’autres et c’est probablement sa réalité à elle. Mais ça n’était pas la mienne. Je n’ai aucun regret du coup.

Nous devions envisager l’allègement thérapeutique, mais il semblerait que cela ne soit pas encore "officiellement" possible. J’espère pouvoir en bénéficier bientôt. Psychologiquement et physiquement ne plus prendre de médoc que 4 jours sur 7 a son importance. Je croise les doigts.

Je me suis aussi libéré avec le dernier récit que j’ai posté, SIDERATION, et vis-à-vis de mes sœurs je me sens soulagé de leur réaction. Cependant je ne regrette pas de ne pas l’avoir dit au moment où tout ceci s’est produit. J’ai fait avec mes armes de l’époque et je n’en avais pas beaucoup à 23 ans. Aujourd’hui j’affronte et même si l’idée de porter plainte est toujours légalement possible, je n’en ai pas besoin dans ma reconstruction, pour avancer. Je ne suis pas une victime et je n’ai pas besoin d’être reconnu comme tel. Je gagne en étant le garçon que je suis aujourd’hui. J’avais l'intention de revenir sur le sujet plus longuement mais je n’en ai plus l’envie. J’ai raconté mon histoire, j’ai tenté de décrire toutes les étapes émotionnelles de ce que je crois être un traumatisme. Je n’ai plus rien à dire sur ce sujet.

Parmi les points positifs du à la création du JOURNAL POSITIF il y a le fait de pouvoir aborder le VIH plus simplement, aussi bien dans la vie de tous les jours que sur les réseaux. La sélection naturelle se fait d’elle-même et je n’ai plus besoin de m’investir vis-à-vis de personnes clairement néfastes. Vous m’avez témoigné beaucoup de jolies choses aussi depuis ces derniers mois et je me souviens qu'au début j’étais vraiment très mal à l’aise de votre affection. Je ne comprenais pas pourquoi vous me félicitiez d’être MOI. Avec du recul, je me rends compte qu’être soi n’est pas si facile finalement et vos mots de soutien l’illustrent parfaitement.

Je suis tombé sur une phrase hier que j'ai envie de vous partager :

«  If you were born into a world you don’t fit into, it’s because you’re here to help create a new one. »

Autrement dit :

« Si tu ne te sens pas à ta place dans ce monde, c'est que tu es fait pour en créer un nouveau. »

Bonnes Vacances les ami.e.s

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